Le rôle des médias dans les relations internationales contemporaines
Résumé
Souvent discutée mais rarement mise en doute, la puissance des médias au sein de la vie politique internationale a été un des constats majeurs du fin XXe siècle. Pourtant, comme constate Piers Robinson, « influence cannot be observed in any obvious or straightforward fashion »[1]. Au cours de cet entretien j’entends passer des exemples les plus concrètes d’influence médiatique – le rôle des médias lors des opérations d’inforguerre, psy-ops et propagande – aux questions plus ontologiques sur la nature des médias et de la communication et leurs rapports avec la société, en passant par le débat sur le jeu d’influences entre médias, élites et populations.
I. La capacité d’influence des médias
A. Propagande et infoguerres : les médias au service de la politique
Si le cynisme des générations modernes vis-à-vis de déclarations politiques a réduit l’efficacité des formes traditionnelles de la propagande, même au sein d’Etats où les puissances publiques ont réussi à garder un contrôle relativement fort sur les médias, l’essor des diverses techniques d’astroturfing (campagnes publicitaires, souvent informatisés, qui cherchent à donner l’impression d’une manifestation populaire spontanée) a réhabilité la propagande autant en matière de relations internationales que sur le plan interne. Au sein des Etats occidentaux l’astroturfing reste largement l’outil de parties politiques, mais ailleurs, notamment en Russie et en Chine, des « web brigades » ou des « 50 cent parties » – c’est-à-dire des agents du pouvoir déguisés en internautes indépendants afin de « mener l’opinion » en ligne - auraient à plusieurs reprises provoqué ou dirigé des attentats par des groupes de jeunes « hackers patriotes » contre des adversaires externes (le mieux connu jusqu’ici étant le campagne d’attentats par déni se service des hackers russes contre l’Estonie en 2007, il