lemoine abercrombie
Gestion tribale de la marque et distribution spécialisée : le cas Abercrombie & Fitch
Jean-François Lemoine et Olivier Badot
Cet article cherche à identifier et à comprendre les principaux leviers d’action mis en œuvre par l’enseigne américaine Abercrombie & Fitch dont le niveau élevé de performance repose sur un processus de tribalisation de sa clientèle. En recourant à un protocole de type interprétatif, nous montrons que si l’enseigne A&F réussit à créer un
« capital tribal » fort, y compris auprès d’un large public, c’est en utilisant trois leviers d’action : la ritualisation du parcours-client, l’érotisation du personnel en contact et surtout l’exacerbation des stimulations sensorielles.
D
ans un environnement de plus en plus concurrentiel, les chaînes de distribution spécialisées, notamment dans le secteur du vêtement, sont à la recherche de leviers de différenciation et de création de valeur orientés vers la profitabilité. Parmi les axes stratégiques possibles, celui du marketing tribal, reposant, entre autre, sur la gestion d’une
« tribu de marque »1 apparaît comme un facteur-clé de succès. Il permet en effet d’intensifier la relation-client et d’améliorer la fidélisation (5, 7).
Cependant, se pose la question du déploiement du marketing tribal (orientation stratégique intensive) dans des chaînes de magasins spécialisés à succursales multiples qui, bien que moins standardisées et massifiées que les chaînes d’hypermarchés ou de supermarchés, privilégient cependant une stratégie de croissance extensive.
En d’autres termes, comment réussir efficacement à gérer une tribu de marque au sein d’une distribution de masse ?
La chaîne américaine de distribution Abercrombie &
Fitch/A&F (encadré 1), spécialisée dans les vêtements casual et sportwear ciblant les adolescents et jeunes
adultes, hommes et femmes, semble y parvenir avec succès2. L’objectif de la présente recherche vise, par un protocole interprétatif (encadré 2), à étudier et à