Les aveugles
(La parabole des aveugles – Bruegel l’ancien.)
B A U D E L A I R E
L E S A V E U G L E S
Introduction : Le sonnet Les Aveugles a paru pour la première fois le 15 octobre 1860 dans la revue l’Artiste, avant de devenir en 1961 le poème XCII de la seconde édition des Fleurs du mal, dans la nouvelle partie des Tableaux parisiens. Il s'agit du septième poème de la section. Il poursuit, après Les sept Vieillards et Les Petites Vieilles, la description des marginaux de la grande ville. On suppose que Baudelaire s'est inspiré du tableau de Bruegel : La parabole des Aveugles (voir en couverture). Cependant il n'est même pas sûr que Baudelaire ait vu ce tableau un jour. Ce poème Les Aveugles provoque un certain malaise, une difficulté à se positionner pour le lecteur. Il ne sait pas si il faut rire d’eux méchamment comme semble nous y inviter le premier vers, ou plutôt s’intéresser au poète « hébété » qui se compare eux. Le lecteur se demande, qu’est-ce, au juste, qu’on semble nous inviter à contempler ?
Nous commencerons par étudier en première partie la description assez monstrueuse que fait Baudelaire de ses aveugles, ce qui nous permettra d’étudier en deuxième partie une allégorie, qui, en dernière partie nous rappellera à nous-mêmes.
La description cruelle des Aveugles.
Jeu sur l’énonciation. Dés le premier vers, l’apostrophe « mon âme » instaure une situation de complicité, entre le poète et son âme, ce qui sera indirectement une mise à distance des aveugles, par l’utilisation de la troisième personne à leur sujet. Ils sont en quelque sorte exclus. On voit également une mise en scène, un effet de retard par rapport au sujet du poème. En effet, sans le titre et le dernier vers, le lecteur ne saurait pas de qui le poème parle, il n’a accès aux aveugles que par leur description, leur aspect, il ne pénètre jamais dans leurs pensées. Le «