Les fètes galantes de verlaine
Stéphanie Girard - www.oui-da.net
L’œuvre de Nicolas Gogol (1809-1852), et plus particulièrement sa nouvelle Le manteau, a été très largement lue, au XIXe siècle, comme un manifeste du réalisme, voire une virulente critique de la société russe et des inégalités sociales en général. Pour les écrivains de la seconde moitié du siècle, Gogol incarne la fin du romantisme et l’entrée de la littérature russe dans la modernité. Pourtant, dès le début du XXe siècle, les critiques nous présentent un portrait tout différent de cet écrivain au caractère énigmatique. En 1906, Dimitry Merezhkovsky et Vasily Rozanov publient des essais intitulés respectivement « Gogol et le diable » et « Pouchkine et Gogol » dans lesquels ils insistent sur le foisonnant imaginaire caractéristique des textes gogoliens. Par le fait même, ils empêchent définitivement les critiques de lire Les âmes mortes ou Le revizor comme des portraits naturalistes de la Russie de l’époque. Dans son célèbre livre intitulé Nicolas Gogol (1944), Vladimir Nabokov insiste sur l’étrangeté à la fois de l’homme et de l’oeuvre. Ni l’une ni l’autre, de toute évidence, ne s’inscrivent dans une vision monosémique de la réalité et, par conséquent, aucune interprétation ne parvient à les cerner tout à fait.
Si Nabokov préfère mettre de l’avant une étrangeté qu’il se refuse presque à nommer, il me semble qu’elle n’est pas sans lien avec la présence du fantastique non seulement dans Les nouvelles pétersbourgeoises, mais aussi dans Le revizor et dans Les âmes mortes. Le fantastique, genre littéraire apparu à la fin du XVIIIe siècle, s’est développé en France, mais aussi et peut-être surtout en Angleterre et en Russie. En réalité, ce genre n’a jamais vraiment été codifié - il suppose donc une liberté formelle et une ouverture sémantique - et ne s’oppose pas au réalisme, même historiquement, mais cohabite plutôt avec lui. Maupassant, par exemple, était à la fois reconnu comme