Les mythes napoleonniens
Si le XIXe siècle est le siècle du romantisme, c’est entre autres parce que plane sur lui l’ombre de l’épopée et de la légende napoléoniennes. Le Consulat et l’Empire ont eu une portée bien plus grande que ne le laisse attendre a priori un épisode finalement bien court. Ces années ont en effet donné naissance à des mythes puisqu’il y a eu fabulations, déformations et interprétations objectivement récusables du réel.
Les mythes nés de l’Empire révèlent les traces que ce régime a laissées dans la mémoire des Français mais aussi des Européens. Si Napoléon a connu autant de succès posthume, c’est parce qu’il a incarné aux yeux de beaucoup, en France comme à l’étranger, non seulement le fils de la Révolution (1), mais aussi l’homme de la modernité, exprimée notamment dans le Code civil. Pour les Français, plus spécifiquement, il est aussi celui qui a fait flotter au travers de l’Europe entière un drapeau tricolore victorieux. Il est également celui qui a laissé le souvenir d’un souverain proche de son peuple, issu de lui et sachant manifester son amour des Français. Enfin, sa personnalité même a nourri la légende d’un chef d’État suscitant l’admiration pour sa formidable ascension et pour son génie multiforme, lui permettant la maîtrise de la guerre comme l’intelligence de la politique et l’art de l’efficacité administrative.
Mais ces mythes ont été initialement fabriqués du vivant même de Napoléon : dès la première campagne d’Italie, les journaux diffusés dans son armée et dont il contrôle la rédaction le présentent précisément sous le jour d’un chef aux capacités extraordinaires. Sous le Consulat, la propagande s’emploie à rappeler comment la deuxième campagne d’Italie s’inscrit dans la continuité des guerres de la Révolution, puis elle souligne l’intense travail fourni par le nouveau maître de la France pour mener son œuvre administrative. Sous l’Empire, les rares journaux qui subsistent restent dans ce ton tandis que l’art est tout entier