Machiavel
Les nombreux historiographes acquis à l’anti-borgianisme n’ont pas manqué de mettre en exergue le court dernier acte tragique et sans gloire de la vie de Borgia où transparaît, non plus un politique avisé et un stratège incomparable, mais un homme aux dimensions humaines, accumulant les erreurs dans un enchaînement fatal, comme si ses dépenses innombrables en perfidie, en intrigue et pensées retorses avaient tari la source de son génie malfaisant et le vouait du même coup irrémissiblement à la damnation. A la lumière d’un tel éclairage, la place qu’occuperait la figure de Borgia dans la galerie machiavélienne des grands capitaines de ce monde, constituerait une sorte de contresens, une « illusion »2 dans le désillusionnement désabusé du paysage politique italien. Pouvons-nous nous satisfaire d’une telle conclusion ?
Remarquons d’abord qu’une telle interprétation préjuge du sens ultime de la problématique machiavélienne en l’enfermant a priori dans le cercle des questions qu’inaugure le machiavélisme. Ensuite, que l’essentiel n’est pas de savoir si la