Marot et la poésie française
De 1500 à 1550 '.
I. — Les prédécesseurs de Marot.
Les grands Rhétoriqueurs. — Entre le moyen âge, qui eut tant de peine à mourir, et la Renaissance dont les pleins effets se faisaient attendre en France, l'histoire de notre poésie pendant la première moitié du xvie siècle serait une période confuse et assez aride à parcourir, s'il ne s'y rencontrait un poète qui la résume presque à lui seul, et offre déjà plus qu'une ébauche de l'esprit national, dans ce qu'il a de grâce aimable et légère, de délicatesse et de bon sens. Mais Clément Marot ne saurait être isolé de ceux qui l'ont précédé, de ses contemporains et de- ses successeurs immédiats : il importe de le replacer au milieu d'eux, ne fût-ce que pour goûter pleinement tout ce qu'il y a de personnel dans son exquise et libre allure.
Le xvc siècle aArait Aru fleurir deux poètes d'un génie différent et d'un mérite inégal : l'un, attaché au système allégorique du
Roman de la Rose, mais sans gaucherie, déjà plein de raffine- ments et presque de préciosité; l'autre, plus grand et plus
Arivant, poussant parfois jusqu'au cynisme sa hardiesse et sa verve native, Arrai et profond malgré tout, auquel n'ont pas
1. Par M. Bourcicz, professeur à la Faculté des lettres de l'Université de Bordeaux. downloadModeText.vue.download 100 sur 922
LES PRÉDÉCESSEURS DE MAROT 8S
même manqué quelques mélancoliques accents. Cependant ni l'un ni l'autre n'eurent une influence décisive, semble-t-il, sur la littérature de leur temps : "Villon était d'une originalité trop puissante pour avoir des héritiers clignes de lui; de Charles d'Orléans, on n'imita que ce qu'il avait eu de pire, le svmbo- lisme obscur. Et même ne l'avait-on pas oublié? Si, vers la fin du xv° siècle, les poètes allaient à l'école, c'était bien plutôt à celle d'Alain Chartier, « doux en ses faicts et plein de rhétorique ».
Soûs l'influence d'Alain Chartier, il s'était