Mes heures Perdues - Arvers
I) Un thème classique : une passion amoureuse
II) La confession d’un désespéré
Félix Alexis Arvers (1808-1850) connut la célébrité de son vivant avec ses pièces de théâtre, hybrides de vaudevilles et de mélodrames, puis il eut une gloire posthume avec Sonnet, qui fut pastiché d’innombrables fois. Ce poème reprend le thème classique de la passion amoureuse destructrice et livre la confession désespérée de sa victime.
I) Un thème classique : une passion malheureuse
On reconnaît la forme classique du sonnet, souvent employée pour chanter les souffrances amoureuses. La disposition choisie, opposant les quatrains – consacrés au mal du poète – aux tercets – décrivant l’attitude de la femme aimée -, révèle la déchirure intime du poète : il est amoureux mais n’ose pas se déclarer. Le système énonciatif permet d’identifier d’une part le poète qui s’implique dans son texte (« je » v.1, 3, 5 et 7), d’autre part celle qu’il aime et qui n’est ni nommée ni décrite précisément (« celle » v.4, « elle » v.5, 9, 10, 13). Elle est le sujet des phrases et est placée en début de vers : v.9, 10 et 13 (le pronom personnel ouvre et ferme le vers). Alors que le poète parle de lui dans les quatrains, la femme aimée est évoquée surtout dans les tercets. Ce passage du JE au ELLE signifie que le poète s’efface devant celle qu’il vénère comme une divinité : totalement résigné, il souffre en silence. Ce que l’on sait d’elle se résume à des allusions : il est de ses amis (v.6), elle est « douce et tendre » v.9 mais insensible et distraite v.10, et sans doute mariée v.12 (« austère devoir » est une périphrase désignant le devoir conjugal auquel elle est entièrement soumise).
Le paradoxe de cette situation est exprimé dans les nombreuses antithèses qui mettent en valeur le champ lexical de l’amour et celui de la religion. Arvers définit en effet le « coup de foudre » vers 2 (opposition entre « éternel » et « en un moment ») et emploie la métaphore classique