Montage - shoah
Paris, 1979-1985
Le Montage du Film 'Shoah'
Ziva Postec - Paris, Août 1987
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J'ai commencé à travailler sur "Shoah" en Septembre 1979 et fini en Mai 1985, date de la sortie du film sur les écrans parisiens. Presque six ans. "Comment as-tu résisté au temps?" - me demandent souvent des amis – "N'avais-tu pas des moments où tu n'en pouvais plus?"... J'ai craqué plusieurs fois, hurlé, pleuré. J'ai cherché à me séparer du film: Quelque chose de plus fort que ces refus, me poussait en avant. A l'époque j'étais incapable d'expliquer la nature de cette force, je vais le tenter à présent. Sionistes, mes parents sont arrivés en 1933 en Israël – La Palestine de l'époque – sous mandat Britannique, de la Hongrie pour ma mère, de la Tchécoslovaquie pour mon père Dans leurs plus terribles cauchemars, ces gens ne pouvaient imaginer qu'ils ne reverraient plus jamais leurs familles – Ce fut pourtant le cas: parents, sœurs, frères… tous ont été brûlés à Auschwitz. De ce fait, mon enfance (je suis née après le début de la guerre) a été marquée par un silence presque absolu concernant le passé proche et lointain de mes parents. Pas de récits ni d'histoire. L'Europe a été comme effacé de leur mémoire. Je me souviens d'eux arpentant comme des fous les ports et les camps d'internement anglais à la recherche des membres de leurs familles parmi les rescapés des camps de la mort qui avaient fui l'Europe et qui étaient parqués là interdits d'accès en Palestine….
Liens interrompus. Déchirure qui n'a jamais pu se cicatriser s'est installée en eux mêlée aux sentiments de culpabilité. J'ai vécu plus de 25 ans à Paris. Ils n'ont jamais pu reprendre le chemin de "retour" même pour me rendre visite….. Faire le montage de "Shoah" c'était parler pour briser ce silence de mes parents? Leurs donner une voix; c'était dire pour eux, pour moi, pour ma fille. Retrouver notre mémoire, l'assumer avec leur déchirure pour pouvoir aller au-delà sans jamais oublier. Mon cas n'est