Morts sans sépultures
1-Présentation :
Le théâtre de Sartre apparaît comme la partie de son oeuvre la plus facile d'accès. On y retrouve la quasi totalité des thèmes relatifs à sa pensée.
Quant à la passion de la quête théâtrale qui anime Camus, elle prend ses assises dans la double réflexion éthique et esthétique particulière à sa pensée.
Je tenterai d’en définir les contours à travers une étude de quelques une de leurs pièces.
Sartre n'est pas venu au théâtre sous l'effet d'une passion de la scène ou d'une vocation impérieuse, mais pour toucher de la manière la plus directe et la plus efficace un large public, comme l'exigeaient les impératifs de la littérature engagée.
Acteur ou directeur de troupe dans les années 1936-1938, metteur en scène ou adaptateur scrupuleux des pièces les plus diverses, dramaturge original enfin, avec Caligula, Le Malentendu, L’Etat de Siège, et Les Justes, Camus a eu avec le théâtre tous les rapports possibles, du plus concret au plus intellectuel. Le théâtre lui est apparu comme une forme d'expression privilégiée, à plus d'un titre: il est « un art de chair, qui donne à des corps vibrants le soin de traduire ses leçons », disait déjà le Manifeste du Théâtre de l'Équipe en 1937.
Les quelque dix pièces que Sartre a écrites de 1943 à 1965 ont connu à vrai dire des fortunes diverses: les plus appréciées du public ont souvent été les moins ambitieuses, celles que l'auteur avait conçues et rédigées dans la hâte, comme Huis Clos (1944) ou La Putain respectueuse (1946). Deux seuls échecs véritables, tous deux liés à des œuvres dont l'engagement politique était assez agressif: Morts sans sépulture (1946) et Nekrassov (1955). Mais aussi, pour ses trois tentatives les plus hardies et les plus complexes, un accueil souvent mitigé: Les Mains sales, Le Diable et le Bon Dieu, Les Séquestrés d'Altona, desservis en général par des mises en scène timides, ont à la fois