Métamorphoses du travai
L’apport majeur du livre de 1988 d’André Gorz, Métamorphoses du travail, quête du sens (Editions Galilée), réside essentiellement dans ce titre, Quête du sens. Jamais, depuis les manuscrits de 1844 de Karl Marx, la question du sens n’avait été à ce point placée au centre de la réflexion du mouvement ouvrier. Je dis bien « ouvrier », car la première partie du titre montre bien qu’André Gorz continue, comme il l’a toujours fait, à se poser en interlocuteur du mouvement syndical. Il est donc assez curieux que la réédition aux éditions Folio Essais (réédition précieuse par les annexes qu’elle contient), ait changé de titre : Métamorphoses du travail, critique de la raison économique, ce qui en affaiblit considérablement la portée.
Ce livre de 1988 marque en quelque sorte un point d’équilibre du nouveau Gorz, après la répudiation de ses thèses initiales (Stratégie ouvrière et néocapitalisme, Réforme et révolution, Critique de la division du travail, dont le point focal était essentiellement une réflexion sur le travail en tant que tel, avec pour débouché l’autogestion), et les très provocateurs ouvrages du début des années 80 (Adieux au prolétariat, 1980, Les chemins du paradis, 1983). Dans ces deux ouvrages controversés, André Gorz rompait de façon spectaculaire avec le marxisme et avec toute l’eschatologie du travail, en tant que constitutif d’un sujet émancipateur, en tant que lieu d’émancipation, en tant qu’objectif de l’émancipation (2).
Sensible aux critiques assez virulentes que lui avait valu ces deux livres, André Gorz amoindrit leur radicalité, récupère (mais est-ce au delà du bout des lèvres ?) ses thèses anciennes sur la réforme du processus productif lui-même, et bascule totalement la notion de sens du travail non plus dans l’activité elle-même mais vers le but de cette activité.
Depuis 1980, Gorz a classé à la serpe deux types de travail, le travail hétéronome et le