Nanascp
SGANARELLE – Ma foi, nous voilà déguisés à merveille.
DON JUAN – Il est vrai que te voilà bien.
SGANARELLE – Savez-vous, Monsieur, que cet habit me met déjà en considération ?
DON JUAN – Comment donc ?
SGANARELLE – Cinq ou six paysans et paysannes me sont venus demander mon avis sur différentes maladies ; j’ai fait mes ordonnances à l’aventure et ce serait chose plaisante si ces malades guérissaient.
DON JUAN – Par quelle raison n’aurais-tu pas les mêmes privilèges qu’ont tous les autres médecins ? Leur art est pure grimace.
SGANRELLE –Vous êtes aussi impie en médecine ?
DON JUAN – C’est une des grandes erreurs qui soit parmi les hommes.
SGANARELLE – Vous avez l’âme bien mécréante. Cependant le vin émétique fait buire ses faisceaux. J’ai vu un effet merveilleux. Il y avait un homme à l’agonie depuis six jours ; on s’avisa enfin de lui donner de l’émétique. Il mourut.
DON JUAN – L’effet est admirable. Tu as raison.
SGANARELLE – Mais laissons là la médecine car cet habit me donne de l’esprit et je me sens en humeur de disputer contre vous. Est-il possible que vous croyiez au Ciel ? à l’Enfer ? et au Diable ?
DON JUAN – Laissons cela.
SGANARELLE – Et dites-moi un peu , le Moine bourru , qu’en croyez-vous ?
DON JUAN – Ah ! ah ! ah ! La peste soit du fat.
SGANARELLE – Il n y a rien de plus vrai que le Moine bourru. Qu’est-ce donc que vous croyez ?
DON JUAN – Je crois que deux et deux sont quatre et que quatre et quatre sont huit.