Nietzsche et la religion
Nietzsche, qui définit l’homme comme « fabricateur de dieux » est, avant tout, un critique de l’idolâtrie qui peut prendre bien d’autres formes que celle de la religion. Le christianisme est, selon lui, à l’origine de sa propre « euthanasie » qui résulte d’une contradiction entre sa morale de probité et le dogme. La sortie du christianisme n’est donc pas en tant que telle une bonne nouvelle, ni une nouvelle rassurante. Cependant, la leçon de Nietzsche est que l’avenir reste fondamentalement ouvert, y compris à une problématique « reviviscence du divin ».
2La pensée de Nietzsche peut-elle être de quelque intérêt pour qui s’interroge sur l’avenir de la religion en ce début de troisième millénaire ? Si Nietzsche se réduisait à la vulgate avec laquelle on confond sa philosophie religieuse, à savoir la mort de Dieu et (la conjonction semble aller de soi) le triomphe d’un homme enfin libéré et autonome, délié qu’il serait de croyances infantiles et paralysantes, nous n’aurions guère à nous arrêter à sa pensée. Nous voyons trop bien perdurer les religions, même sous des formes inquiétantes et menaçantes, nous savons trop bien aussi à quel point le mythe d’un homme enfin libéré des illusions et adulte a volé en éclat pour que nous nous arrêtions longtemps à ces fausses prophéties. Mais justement si Nietzsche peut nous intéresser, c’est-à-dire en philosophe nous aider à penser à notre tour la situation religieuse originale qui est la nôtre, c’est que sa pensée ne s’identifie pas à ces lieux communs, même si des lectures rapides ou intéressées l’ont réduit à ces pauvretés, y compris du côté de théologiens chrétiens.
3Il faut préciser immédiatement que Nietzsche s’interroge peu sur l’avenir de la religion en tant que telle, si l’on veut entendre par là qu’il parlerait de religion en général, ou mettrait en cause un soi-disant sentiment religieux pour en montrer la vanité, ou, projet encore plus improbable, qu’en philosophe des religions qu’il