Orientations intimes et constructions de soi
ORIENTATIONS INTIMES ET CONSTRUCTIONS DE SOI. PLURALITE ET DIVERGENCES DANS LES EXPRESSIONS DE LA SEXUALITE ∗
RÉSUMÉ : Loin d’être une fonction biologique qui aurait une transcription psychologique et
sociale immédiate, la sexualité renvoie à des configurations sociales, dont les composantes et les limites font question : il n’y a pas de frontière objective du sexuel et du non sexuel et les territoires même qu’elle occupe dans la vie sociale ou dans la vie des individus sont objet de débat et de contestation. Ces configurations, que nous dénommons orientations intimes, ne désignent pas des types psychologiques, mais des logiques sociales d’interprétation et de construction de la sexualité, c’est-à-dire des manières de la définir et d’en user, qui s’expriment aussi bien en des représentations et des normes culturelles qu’en des modes d’interaction entre partenaires ou des affects liés à la sexualité. Trois grandes orientations intimes ont été distinguées. Dans le modèle du réseau sexuel, la sexualité du sujet est extériorisée et l’individu est défini par son inscription dans un important réseau de partenaires. Dans le modèle du désir individuel, c’est avant tout le retour périodique du désir et de son accomplissement qui crée le sentiment de continuité du sujet. Enfin, dans le modèle de la sexualité conjugale, l’activité sexuelle n’a de sens que comme composante de la construction ou de l’entretien d’une relation dyadique. L’existence de trois lectures très contrastées de la sexualité peut conduire à des conflits d’interprétation radicaux, soit au plan politique ou macro-social (comment réguler ou représenter la sexualité ?), soit au plan interindividuel (que veut chacun des partenaires dans un rapport sexuel ?), soit enfin au plan intrapsychique (que faire quand plusieurs interprétations de la sexualité coexistent chez un même individu ?).
INTRODUCTION
L’idée que l’expérience sexuelle est devenue le lieu central de la construction morale