1) Peut-on avoir peur d’écrire son autobiographie ?

Peut-on avoir peur d’écrire son autobiographie ? Étonnante question ! En effet, nul auteur n’est obligé de raconter sa propre vie, de se mettre à nu devant des lecteurs et d’aller rechercher des souvenirs enfouis. Cependant, ceux qui se lancent dans une telle entreprise doivent surmonter bon nombre d’obstacles. Qu’ils veuillent témoigner sur leur époque, se découvrir ou encore se justifier, comment les écrivains feront-ils face aux défauts de leur mémoire ? Comment pourront-ils respecter le pacte autobiographique et affronter la vérité ? Enfin, comment seront-ils à la hauteur des attentes des lecteurs et de leurs prédécesseurs ? Telles seront les questions auxquelles nous répondrons.
Tout autobiographe est amené à aller rechercher des souvenirs lointains et le plus souvent enfouis. Incomplets ou partiels, ses souvenirs datent parfois de la petite enfance et de l’adolescence. L’une des premières difficultés à laquelle va se frotter l’auteur est l’imprécision de sa mémoire.
En effet, l’autobiographe écrit généralement longtemps après les faits. Soixante ans peuvent quelquefois s’être écoulés entre le moment du souvenir et le moment de l’écriture. Annie Ernaux, par exemple, dans Les Années raconte des souvenirs d’août 1949 alors qu’elle écrit en 2008. L ‘autobiographe doit donc fournir un effort mémoriel énorme pour pouvoir retracer l’ensemble de son histoire. Là est l’une des plus grandes difficultés de ce genre littéraire, car la mémoire joue des tours et l’auteur souvent ne se souvient que d’événements marquants. Tous les autres souvenirs sans intérêt ont été chassés. Roald Dahl dans Moi, Boy écrit que son livre n’est pas une autobiographie, alors qu’il raconte sa vie, mais un condensé « d’incidents » qui eurent lieux durant ses années de collège et lycée. En outre, il n’eut pas à les rechercher, mais juste à effleurer « la couche supérieure de sa conscience » pour les y retrouver tellement ils étaient