Peut on ne pas être sois meme
Pourtant il nous arrive de dire « je n'étais plus moi », « j'étais hors de moi », « je ne me reconnais plus ». Ces expressions révèlent que l'évidence de ma propre identité est comme suspendue. Je fais l'expérience d'une altérité, d'une étrangeté au plus intime de moi-même. Je m'éprouve aux prises avec quelque chose en moi que je ne reconnais pas comme moi. Comment comprendre que je puisse me découvrir voire me proclamer autre ? N'est-ce pas l'aveu que je n'ai pas un rapport de transparence avec moi-même et que chacun peut être pour soi, au gré des situations, un objet de surprise ? Surprise désagréable car je suis rarement tenté de dire « ce n'est pas moi » lorsque ce qui me rend perplexe est gratifiant. Alors qu'en est-il de cette expérience ? Faut-il dire que « je est un autre » selon la formule de Rimbaud ou avec Sartre identifier une stratégie de mauvaise foi ?
Parce qu'enfin cet être que je dis ne pas être moi, je sais bien que c'est moi. D'où le véritable enjeu de cette question soumise à notre réflexion : qu'est-ce donc qu'être soi-même pour un pour-soi, c'est-à-dire pour un être qui est toujours dans la division de soi avec soi ? Est-il jamais possible de réaliser l'unité de son être et de revendiquer une identité déterminée ? La conscience n'est-elle pas ce qui nous condamne à nous conquérir contre tout ce qu'elle néantise parce que ce qui nous élève à la dignité d'une personne est aussi ce qui nous oblige