Avec Nietzsche nous avons vu que l'on peut en un sens forcer quelqu'un à devenir libre. Mais lorsque l'on a affaire à un sujet constitué, peut-on le forcer à être libre. La possibilité doit être ici interrogée en un sens moral, c'est-à-dire qu'il s'agit de répondre à la question de savoir s'il est légitime de le faire. Or il semble qu'il soit légitime de le faire lorsque l'on a affaire à un sujet qui ne comprend pas le sens de sa propre liberté. Dans Le contrat social, Rousseau considère que la véritable liberté n'est pas la liberté naturelle, mais celle à laquelle on s'élève en entrant dans l'état civil. Cette entrée se fait à la faveur d'un contrat par lequel pour assurer leur sécurité, les hommes se démettent de leur liberté naturelle au profit de tous, c'est-à-dire au profit de la volonté générale. Or c'est la volonté générale qui ensuite fait les lois, et chaque citoyen participe de cette volonté générale. On voit donc que si l'individu perd sa liberté naturelle de faire tout ce qui lui plaît, il gagne la liberté civile, qui consiste dans le fait de n'obéir qu'à la loi (et non à tel ou tel individu). Or puisqu'il a lui-même contribué à l'établissement de la loi en tant qu'il est membre de la volonté générale, l'individu n'obéit ainsi qu'à lui-même et il est véritablement libre. Rousseau pense que celui qui refuse d'obéir méconnaît sa liberté, et qu'on a donc le droit de « le forcer à être libre », c'est-à-dire à respecter les