Poëme
La présence du renard indique avant même de commencer qu’il y aura un trompeur et une victime. Le renard est présenté comme Capitaine, il est d’avance celui qui commande, qui est capable de prendre des décisions avisées pour se tirer d’un danger.
Le bouc au contraire n’est que son ami, il n’existe que par rapport au renard. Il n’est présenté que physiquement: affublé de cornes, élément qui porte toujours à rire. Cet attribut est particulièrement mis en valeur par la position en fin de vers.
«Capitaine Renard allait de compagnie
Avec son ami Bouc des plus haut encornés»
Les allitérations donnent un fond sonore à ce tableau des deux amis: on les entend trottiner sur le chemin: [k] [p] [t] (capitaine) [d][k] [p] (de compagnie) [k] [b] [k] (avec, bouc) [d] [p] [t] [k] (des plus et la liaison de haut avec encorné)
Les deux caractères sont fondamentalement opposés
Celui-ci ne voyait pas plus loin que son nez ;
L’autre était passé maître en fait de tromperie.
Le premier vers laisse le regard se déplacer le long du nez de l’animal et s’arrêter net sur ce dernier mot: on ne va effectivement pas plus loin.
Le renard a un titre: «maître», un peu comme si aujourd’hui on parlait de «master» de tromperie.
Le problème est rapidement posé. Ils ont soif au début du vers et ils se retrouvent dans le puits à la fin, sans avoir pris le temps de réfléchir.
« La soif les obligea de descendre en un puits. »
Il leur faut ensuite le temps de deux vers pour boire. C’est long. La Fontaine fait durer le plaisir en ajoutant le long adverbe «abondamment», en intercalant «tous deux» et en conjuguant le verbe à un temps composé.
»Là chacun d’eux se désaltère.
Après qu’abondamment tous deux en eurent pris, »
Nul doute que le renard a bien utilisé ce temps puisqu’il prend la parole juste après.
« Le Renard dit au Bouc : Que ferons-nous, Compère !
Ce n’est pas tout de boire ; il faut