Rabelais Gargantua 33 Conseillers De Picrochole LA
Rabelais, Gargantua, Chapitre XXXIII, 1534
« Les conseillers de Picrochole »
Présentation :
Picrochole , « l’homme à la bile amère», est le simple vassal d’un petit fief des bords de la Loire ; il s’est révolté contre son suzerain, Grandgousier, bon et honnête seigneur. Le premier acte victorieux de cette révolte consiste en un vol de fouaces (sorte de grosses galettes de boulangerie) ; à partir de ce délit mineur, l’entourage de Picrochole s’emploie à le bercer d’illusions en flattant ses rêves de conquêtes militaires. Ceux-ci vont se heurter à la réalité :
Picrochole ne dépassera pas les limites du petit territoire qu’il habite – Lerné, aux environs de Chinon - et sera vaincu et humilié par Grandgousier, le bon prince
Ici, le passage est d’une grande force comique , il s’appuie sur la satire du mauvais roi, abusé par ses conseillers ; mais c’est un comique nullement gratuit car il a une valeur argumentative. Il est ainsi l’occasion pour Rabelais d’exposer ses idées humanistes concernant notamment le rôle de la guerre et la manière de gouverner.
Problématique : Comment la satire permet-elle ici de développer une réflexion humaniste sur l’art de gouverner ?
I- La satire des conseillers :
1. Rabelais nous offre le portrait de parfaits courtisans, dont le but est d’abuser le roi, de le manipuler, de l’encourager dans sa folie conquérante, afin de conserver leur place et d’obtenir de lui des faveurs. Au siècle suivant,
La Fontaine fera de la satire des courtisans un sujet privilégié (cf. par exemple les fables Les Obsèques de la Lionne ou
Les Animaux malades de la peste).
2.Ce sont eux qui ont l’initiative du dialogue : Picrochole n’a presque jamais la parole ; il se contente de poser des questions naïves (l.15 « Que fait pendant ce temps la moitié de notre armée ? »), demande la permission de continuer le combat (l.31 « ne tuerons-nous pas tous ces chiens de Turcs… ? »). La situation semble inversée, les sujets prennent clairement le pouvoir sur le