Rinhoceros
- extrait de l’acte 2 de Rhinocéros, pièce avant-gardiste écrite par Ionesco, représentée pour la 1ère fois en 1958. L’auteur se bat contre toutes les formes de totalitarisme sans pour autant critiquer directement: il se refuse d’être engagé. Théâtre souvent classé avec le théâtre de l’absurde.
Dans ce passage, Bérenger est chez Jean pour s’excuser de la dispute de la veille et se réconcilier avec lui. Jean semble souffrant, mais refuse de laisser Bérenger appeler un médecin. Le malade présente les symptômes du rhinocérisme, et l’on constate un changement physique autant que mental, puisque Bérenger est en train d’essayer de le raisonner alors qu’au début de la pièce c’est Jean qui faisait la morale à son ami.
Nous allons faire ressortir les différentes étapes de la transformation: tout d’abord, nous verrons qu’il y a un moment de tension, puis nous montrerons comment la situation progresse de la farce à la monstruosité, et nous étudierons enfin le rhinocérisme de Jean.
Le face-à-face de Bérenger et Jean a lieu alors que l’invasion des rhinocéros a déjà commencé : on en a ri, mais on ne tardera pas à s’en inquiéter. Pour la première fois, le public assiste ici à la métamorphose - sur scène - d’un humain en rhinocéros. Métaphore des fascismes rampants et triomphants, la rhinocérisation de Jean est un moment clé de la pièce d’Eugène Ionesco : elle dénonce la soumission de tous à un mot d’ordre absurde et criminel.
I. Un moment de tension
A. Le dérèglement de la conversation
1. Une situation conventionnelle
Bérenger se rend chez Jean pour se réconcilier avec lui : ils viennent de se disputer au sujet des rhinocéros d’Asie et d’Afrique. On attend donc une scène de réconciliation et de pardon réciproque...
2. Le détournement
On note dès le début une discordance entre le ton mondain (" je vous en prie ", " mon cher Jean ") de Bérenger, ses appels répétés à la réflexion (" penser ", " comprendre ", " savoir ", " réfléchir ") et la véhémence