Ruy blas
A l’exception d’une Esmeralda, sorte de pensum de circonstance, Victor Hugo n’a rien écrit pour le théaˆtre depuis Angelo, tyran de Padoue (1835). Cette pièce lui avait apporté ce qu’il cherchait, l’argent, mais se situait un ton au-dessous des grands drames précé- dents. Toujours en quête d’argent — et le théaˆtre représente alors le meilleur moyen d’en gagner, car l’auteur reçoit un pourcentage sur les recettes — Hugo a aussi besoin d’une nouvelle scène, car il s’est brouillé avec la Comédie-Française. Malgré un contrat formel, le prestigieux théaˆ tre officiel tardait en effet à reprendre Hernani et Marion Delorme, et ne respectait pas ses engagements à propos d’Angelo. Le conflit a éclaté pendant l’été 1837, suivi d’un procès en novembre, gagné par Hugo. Par ailleurs, ce dernier s’était également brouillé avec le directeur de la Porte- Saint-Martin.
L’auteur d’Hernani s’était rapproché d’Alexandre Dumas, qui, lié au duc d’Orléans, fils du roi Louis- Philippe, et encouragé par Guizot, ministre de l’Ins- truction publique, avait en projet la création d’un nouveau théaˆtre, destiné à devenir le temple du drame moderne. Accordé pour quinze ans en 1836 à Anténor Joly, rédacteur du Vert-Vert, journal de théaˆtre soute- nant les romantiques, le privilège est celui du Second
Extrait de la publication
6 Extrait distribué par Editions Flammarion RUY BLAS
Théaˆtre Français, théoriquement celui de l’Odéon, alors fermé, avec une ouverture à éclipse, et sans troupe permanente. Baptisé Théaˆtre de la Renais- sance, le nouvel établissement s’installe dans la salle Ventadour, abandonnée par des chanteurs italiens et située 44, rue Neuve-des-Petits-Champs, voie peu passante de la rive droite. Comptant faire alterner drame et vaudeville sur la scène, Joly s’associe à un vaudevilliste.
Le recrutement de la troupe pose de nombreuses difficultés en raison des contrats liant ailleurs les acteurs spécialisés dans le