Sincérité
«P
our être sincère, il faut cesser de l’être. » Cette affirmation du philosophe Vladimir Jankélévitch annonce d’emblée ce qu’est la sincérité : un paradoxe. Nous portons tous en nous une exigence de sincérité sans toutefois parvenir à la réaliser. La question de la sincérité se pose dans nombre de domaines : dans nos relations avec les autres et avec nous-mêmes, dans notre usage du langage ; elle soulève un problème de morale, elle engage notre volonté et elle détermine notre rapport avec le mensonge. Suis-je sincère ? Comment l’être ? Faut-il l’être ? Autant d’interrogations que nous nous sommes déjà faites et auxquelles il n’est pas facile de répondre. C’est en cela que le thème de la sincérité intrigue et intéresse. Il me semble que notre époque se trouve confrontée à des bouleversements éthiques et existentiels sans précédent. Par exemple, il est communément admis que les valeurs familiales, morales et religieuses tendent à se disloquer ou, du moins, se transforment
La sincérité
fortement. Je constate que ces changements de repères ont, entre autres, pour conséquence le fait que les psys n’ont jamais été autant consultés : cela révèle notre difficulté à être sincère envers nous-mêmes et envers les autres, manifeste notre besoin vital d’être sincère et, surtout, indique combien la sincérité ne va pas de soi. C’est parce qu’être sincère n’a rien d’évident qu’il est à ce point intéressant de s’interroger aujourd’hui sur la valeur de la sincérité : en perçant son mystère, peut-être parviendrons-nous à résoudre une partie de nos problèmes existentiels. N’avez-vous jamais fait ce constat paradoxal propre à notre monde contemporain où tout est en mouvement : alors que les moyens de transports permettent de se déplacer et de se rapprocher de plus en plus vite, que les outils de communication (Internet, le téléphone portable, la télévision par satellite, etc.) divisent le temps et abolissent les distances, j’ai l’impression que nous nous