Sociologie africaine
L’Afrique noire est un monde. Soit. Mais, ce monde n’existe que par rapport à un ensemble de représentations sociales, symboliquement orientées, qui, en définitive, ne fait sens que parce que la connaissance et la reconnaissance de l’incessant dialogue entre l’ici et l’Ailleurs absolu fondent la vie. Ainsi, dira-t-on que l’homme africain noir ne compose pas seulement avec les réalités apparentes, celles du monde visible, pour vivre ou survivre. Autrement dit, vivre véritablement en terre négro-africaine, c’est négocier aussi avec les vivants invisibles « du village sous la terre » - l’expression est de Louis-Vincent Thomas [2] qui, socio-culturellement parlant, sont pris et vus comme les détenteurs véritables de la « violence légitime » et de l’équilibre social toujours et partout souhaité. Cette façon de concevoir l’atmosphère cosmique, qui est aussi une manière culturellement déterminée de se concilier avec l’univers transcendantal, source imaginaire des réalités occultes, permet au Négro-africain d’être en contact immédiat avec les « connaissances souterraines » de l’invisible afin de convoquer ou de provoquer ses forces numineuses. Pour le Négro-africain, l’univers est un Tout animé. Il est vivant. Par conséquent, les « êtres humains visibles » qui le peuplent, principiellement, en connivence avec les « êtres vivants invisibles », ne le maîtrisent pas tout à fait. Ils manquent de prise sur la totalité de ses « vérités » intrinsèques. Il y a une forme de la connaissance virtualisée dont la maîtrise véritable échappe au commun des mortels. Ainsi se développe un sentiment religieux, fondement primordial de la pensée négro-africaine, au travers duquel se joue la manifestation concrète de l’opposition entre sacré et profane.
Nous nous intéressons au sacré, c’est-à-dire à « ce qui donne la vie et ce qui la ravit », « la source d’où elle coule, l’estuaire où elle se perd », nous dit R. Caillois. C’est aussi, écrit-il, « ce qu’on ne