Soie
Les histoires d'Alessandro Baricco sonnent juste, chacune ayant sa propre musique. Et si Novecento était une musique de jazz portée par un pianiste virtuose, Seta est une musique du silence, une musique mystérieuse et secrète, douce et lente - quasi immobile- , une musique sensuelle apaisée dans laquelle les sons vous caressent et vous effleurent avec une infinie légèreté, vous faisant flotter dans une sorte d'état d'apesanteur.
Et l'auteur installe parfaitement cette atmosphère en prêtant une extrême attention à la progression rythmique de son récit, de ses chapitres et de ses phrases, aux répétitions et aux silences ainsi qu'aux sonorités des mots, aux assonances et aux allitérations.
Une construction cyclique donne à l'ensemble une grande impression d'immobilité. Le Temps ne semble pas vraiment avancer mais plutôt se répéter.
Déjà dans l'exposition (ch.1 à 11) un retour en arrière de deux chapitres ramène vingt ans auparavant pour présenter Baldabiou, l'initiateur de la révolution et de la fortune de Lavilledieu, puis huit ans auparavant pour rappeler sa première influence décisive sur le destin du héros. Et c'est le chapitre 8 (2) qui nous ramène au point de départ en 1861, tandis qu'à partir du chapitre 12 (3) quatre cycles initiatiques vont se succéder. Quatre voyages au Japon démarrant toujours début octobre, passant toujours par le même itinéraire (dans un long refrain ne variant que d'un mot (4)) et se terminant le premier dimanche d'avril pour que le héros assiste à la Grand messe - à l'exception du dernier voyage. (Et, entre ces cycles japonais, se répète aussi un séjour à Nice du héros avec sa femme Hélène...)
2) Dans la symbolique des nombres, 8 est le nombre de l'infini et de l'éternité, celui aussi du nouveau départ...
3) Et 12 le nombre de la perfection de l'espace et du temps, celui des cycles immuables de la nature et de la vie et même de la réincarnation ...
4) Seul change le mot désignant le lac Baïkal : "la mer", "le démon", "le