Taylor2
Version préliminaire, 4 septembre 2012
Bernard Gagnon
Département des lettres et humanités, Université du Québec à Rimouski bernard_gagnon@uqar.ca Le philosophe Charles Taylor a apporté, au cours des dernières années, des modifications majeures à sa pensée politique dans ses conceptions des liens entre diversité et identité collective.
Alors qu’il était reconnu, entre autres, pour ses critiques du principe de la neutralité libérale, de la liberté négative et qu’il proposait une politique du bien commun s’appuyant sur une communauté politique soudée par une forte identité collective (un « nous »), ses écrits plus récents montrent une démarcation nette du philosophe vis-à-vis de certaines de ses positions antérieures : il adhère dorénavant à la neutralité libérale, reconnaît les qualités du libéralisme procédural dans sa gestion de la diversité et propose, comme lien politique, un consensus par recoupement autour de quelques principes politiques de base. Des nuances s’imposent dans le portrait tracé ci-dessus, mais on peut néanmoins parler d’une « conversion » de Charles Taylor aux postulats de base du pluralisme libéral.
Ces changements dans la pensée du philosophe ont des effets sur la manière dont il conçoit la diversité dans les sociétés démocratiques contemporaines. Selon la politique de la reconnaissance, énoncée en 1992, les identités demeuraient tributaires des délibérations démocratiques d’une communauté singulière qui pouvait, en raison de considérations sur un bien commun culturellement et historiquement situé, limiter les principes de neutralité de l’État et d’égalité entre les conceptions distinctes de la vie bonne. La diversité devait donc être l’objet d’une reconnaissance publique pour avoir des effets structurants dans la société. Ce n’est plus le cas dans les écrits récents du philosophe dans lesquels c’est dorénavant la diversité qui structure les contours des délibérations