Temps et histoire en débat
“Tout s’oublie” et “rien ne passe”
Temps et histoire ne marchent pas, comme on le sait, d’un même pas. C’est pourquoi il importe de distinguer le récit historique des constructions des contemporains. Michèle Riot-Sarcey interroge la notion d’historicité en se référant aux travaux de Koselleck. L’usage de l’historicité, dont elle donne une définition, permet alors d’analyser les enjeux du temps : enjeux sémantiques et politiques.
Comme exemple, et pour sa démonstration, Michèle Riot-Sarcey analyse un texte de Thiers de 1831, qui présente un usage du temps, alors mis au service d’une interprétation de 1830 d’où sont gommées les aspérités de l’événement, impossible à loger dans une vision linéaire du temps politique.
1Tout semble avoir été dit sur le rapport familier de l’historien au temps. Cependant, l’idée, simple en apparence, suscite encore des interrogations et provoque des malentendus, sans engendrer des échanges d’ordre épistémologique. Pourtant, le temps dans sa linéarité, compagnon des récits historiques, n’est pas toujours perçu au rythme des horloges. Sous ses multiples facettes, il déborde la durée et dérange les continuités, en s’emparant des esprits pour s’arrêter, perdurer, bousculer, infléchir les comportements et bouleverser, parfois sans rien changer des rapports sociaux, les modes d’être au monde. * 1 . Paul RICŒUR, La Mémoire, l’Histoire, l’Oubli, Paris, Éditions du Seuil, 2000, p. 111. * 2 . Voir HEGEL, Leçons sur la Philosophie de l’Histoire, Paris, Éditions Vrin, 1946 (1831-32), 417 p.(...)
2Temps et histoire ne marchent pas, comme on le sait, d’un même pas. Le passé se déploie dans le temps et le temps passe en effaçant la part majeure du passé. Il me semble que la tâche de l’historien se situe précisément à un point de convergence entre deux visions du XIXe siècle, également partagées par les contemporains : entre l’obsession de Balzac devant le temps qui passe, quand “tout s’oublie” et l’objection