Tourisme et mondialisation
5942 mots
24 pages
Tourisme et mondialisation Vers une disneylandisation universelle ? « Nous sommes tous les descendants de Parsifal et de Walt Disney. » Marc Augé, L’impossible voyage Payot 1997 Sylvie Brunel1 Tourisme, touriste… Deux mots qui portent une charge symbolique forte, généralement perçue comme négative par une partie de l’opinion publique : le touriste, c’est celui qui dénature, pollue, avilit, réduit les lieux et les gens à une utilisation superficielle et forcément préjudiciable. Celui dont on ne veut pas faire partie. Pourtant, tous les pays du monde souhaitent attirer des touristes, car, en drainant 800 millions de personnes chaque année, l’industrie touristique, troisième industrie mondiale, permet d’employer 10 % de la population active et de fournir autant du PIB mondial2. C’est le premier paradoxe du touriste, à la fois honni et convoité. L’évolution de la demande touristique vers des produits de plus en plus individualisés, en réaction contre le tourisme de masse des années 60, et le refus du touriste d’être considéré précisément comme un touriste3 ont induit de nouvelles formes d’usage touristique et créé de nouveaux lieux du tourisme. Il s’agit de procurer au touriste le dépaysement et l’exotisme qu’il recherche. Dans cette optique, rien de plus efficace que la disneylandisation des territoires et des cultures. La re-création touristique d’un passé idéalisé En réaction contre l’image négative du tourisme qui a accompagné sa démocratisation et sa généralisation – au point que, comme le souligne l’ensemble des travaux du sociologue Jean-Didier Urbain, le mot touriste est devenu une injure -, une partie croissante des 800 millions de touristes, la plus aisée, veut que son voyage lui procure un sentiment de découverte, du dépaysement et de l’exotisme, bref la conviction de, justement, ne pas faire partie des touristes. A l’image de ce que l’on observe concernant la vogue des prénoms donnés aux nouveaux-nés (chacun étant persuadé de faire preuve d’originalité