a la plus belle
Nul ne l'a vue et, dans mon coeur,
Je garde sa beauté suprême ;
(Arrière tout rire moqueur !)
Et morte, je l'aime, je l'aime.
J'ai consulté tous les devins,
Ils m'ont tous dit : " C'est la plus belle ! "
Et depuis j'ai bu tous les vins
Contre la mémoire rebelle.
Oh ! ses cheveux livrés au vent !
Ses yeux, crépuscule d'automne !
Sa parole qu'encore souvent
J'entends dans la nuit monotone.
C'était la plus belle, à jamais,
Parmi les filles de la terre...
Et je l'aimais, oh ! je l'aimais
Tant, que ma bouche doit se taire.
J'ai honte de ce que je dis ;
Car nul ne saura ni la femme,
Ni l'amour, ni le paradis
Que je garde au fond de mon âme.
Que ces mots restent enfouis,
Oubliés, (l'oubliance est douce)
Comme un coffret plein de louis
Au pied du mur couvert de mousse. Charles Cros
Après plusieurs lectures, je pense que Charles Cros joue expressément sur l’ambiguïté. Il parle tout au long de la femme, sans pour autant la mentionner explicitement.
Il s'agit bien d'une morte. Les emplois de l'imparfait, la mention « morte », le travail du devin rendent l'explication claire. Là où tu as pu avoir le doute, c'est par le jeu avec les temps. En effet, temps passé et temps présent (voire temps futur) ne forment qu'un. Cette question du temps est lié au regret, à la souffrance et au désirs de la revoir. L'instant présent est douloureux.
Le poème se compose ici de strophes de quatre vers : un poème de 6 quatrains.
Concernant la rime, c'est a b a b - a b a b. Ce sont des rimes croisés.
Au niveau du mètre, chaque vers se compose de huit syllabes. Des vers en octosyllabe.