A PROPOS D’ARTHUR RIMBAUD

La prose poétique de Rimbaud offre une correspondance avec celle de Baudelaire qui en donne cette définition :
« une prose poétique musicale, sans rythme, sans rime, assez souple et assez heurtée pour s’adapter aux mouvements lyriques de l’âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience. »
Je m’interroge : la fuite de Rimbaud est-elle une pièce du tissu de son enfance ?
La relation affective déchirante qui le liait à sa mère, le départ de son père ont-ils joué un rôle déterminant dans le choix de révolutionner la construction poétique engagé par ce si jeune garçon ?
Est-ce le refus de publication qui a révolté l’assoiffé-poète qui voulait être lu, qui voulait exister affectivement aux yeux de quelqu’un qui ne pouvait être ni sa mère, ni son père, qui fut peut-être d’abord son professeur puis Verlaine bien avant un public?
Est-ce cette répétition des refus impitoyables qui le pousse à rejeter le monde, la littérature, le rêve conceptualisé au travers de la création d’une poésie désancrée et perturbante, à mettre une nouvelle distance entre lui et le réel, entre lui et les autres en s’éloignant vers d’autres terres littéraires d’abord, puis un ailleurs qui s’imagine en premier lieu avant de pouvoir être touché du regard et des mains du poète ? Alors vient un exil vers des territoires lointains et inconnus ; nouveaux cela veut dire encore à explorer, des territoires où Rimbaud pourrait trouver cette place qu’on lui refuse ou qui n’existe pas pour ce qui bat en lui ?
Le garçon sarcastique, militant-révolté, empathique face à la misère d’autrui, qui porte dans la contestation sa propre déchirure et expérimente sa douleur, a dramatiquement rompu avec le consensus, l’ordre établi et régnant. Violent, fugueur, passionné, déraisonnable, extrémiste dans ses lignes et ses gestes, il s’est étourdit d’application à se débattre avec constance dans un univers trop étriqué, qui n’en finissait pas pour lui de rétrécir, de