Si l’on désirait placer en exergue une question essentielle à propos de l’existence, sans aucun doute devrait-ce être la suivante, posée par Leibniz : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? ». Néanmoins, cette question n’est pas sans présupposés majeurs ; elle naît dans le contexte chrétien du problème de la création et sous-entend que l’existence est supérieure à la non-existence, qu’elle est une « perfection ». De plus, elle concerne toutes les créatures de Dieu, les choses et les animaux tout autant que les hommes. Or, il semble que c’est à partir du moment où la question de l’existence se « réduit » à celle de l’existence de l’homme qu’elle acquière une nouvelle formulation et qu’elle devient inséparable d’une question plus spécifique : « l’existence a-t-elle un sens ? ». À cette dernière question, les philosophes ne prétendent pas répondre frontalement, mais l’on peut dire qu’elle oriente secrètement leurs réflexions. En effet, évoquer le sens de l’existence montre que, pour l’homme, il n’est jamais suffisant (bien que cela soit nécessaire !) de combler ses besoins vitaux, de vivre au sens seulement biologique. L’homme est bien un être naturel mais il est en même temps plus que cela : il est, mais il a aussi conscience d’être. L’homme se rapporte à des fins, des objectifs, des buts. Il est lié à des projets.
« Cent thalers réels ne contiennent rien de plus que cent thalers possibles. Car, comme les thalers possibles expriment le concept et les thalers réels, l’objet et sa position en lui-même, au cas où celui-ci contiendrait plus que celui-là, mon concept n’exprimerait pas l’objet tout entier et, par conséquent, il n’en serait pas, non plus, le concept adéquat. Mais je suis plus riche avec cent thalers réels qu’avec leur simple concept (c’est-à-dire qu’avec leur possibilité). » Kant, Critique de la Raison pure. Les philosophes antiques ne semblent pas s’être intéressés particulièrement à ce qui fait la spécificité de