L'écume des jours, boris vian
La dimension tragique d’un roman d’amour
vendredi 23 novembre 2007, par Clair de Plume
L’écume des jours parait pour la première fois en avril 1947. A l’époque, le livre ne se vendit pas. A partir des années 60, il devint pourtant un roman culte.
L’œuvre de Boris Vian est toute entière empreinte d’insolite et d’absurde. L’écume des jours ne fait pas défaut à ce constat.
L’action se situe à Paris, car il s’agit bien de Paris, ainsi que le montre le monologue intérieur de Colin réfléchissant à l’endroit où il va emmener Chloé se promener : « Pas à l’hôpital Saint-Louis, c’est défendu. Pas au musée du Louvre, il y a des satyres derrière les chérubins assyriens. Pas à la gare Saint-Lazare, il n’y a plus que des brouettes et pas un seul train ». C’est un Paris méconnaissable. On évolue tantôt dans l’univers merveilleux des contes de fées : deux soleils éclairent l’appartement de Colin (car celui-ci aime la lumière) et des anguilles circulent dans les canalisations ; tantôt dans une atmosphère angoissante : « Le froid retenait les gens chez eux. Ceux qui réussissaient à s’arracher à sa prise y laissaient des lambeaux de vêtements et mouraient d’angine ».
Cependant, tant qu’une situation pénible ne les concerne pas directement, les personnages principaux demeurent insensibles.
Ainsi, au cours de leur première promenade ensemble, Chloé et Colin passent devant une vitrine de propagande pour l’Assistance Publique, dans laquelle « un gros homme avec un tablier de boucher, égorg[e] de petits enfants ». Colin commente ainsi la scène : « – (...) Ils les ont pour rien, à l’Assistance Publique ». De la même façon, les patineurs qui s’effondrent sur la glace, le chef d’orchestre qui s’écrase sur les dalles de l’église, les ouvriers qui périssent enchaînés à leur machine, n’émeuvent personne. Leur mort laisse les héros et le lecteur indifférents. Elle est traitée par Boris Vian comme un accident fortuit et même parfois comme un