L Ordre Nouveau
Lorsque la France capitule, en 1940, Jacques Prévert écrit L’ordre nouveau – « poème de résistance » selon Georges Bataille – dans lequel il met en scène un nazi qui, après avoir assassiné une jeune fille, aperçoit :
[…] Dans les débris
D’une boutique calcinée
Le portrait d’un vieil homme blême
[Qui] le regarde avec bonté
Sur sa manche des étoiles brillent
Comme aussi sur son képi
Comme les étoiles brillent à Noël
Sur les sapins pour les petits
Et l’homme des sections d’assaut
Devant le merveilleux chromo
Soudain se retrouve en famille
Au cœur même de l’ordre nouveau […]
Le portrait du vieil homme blême est celui du Maréchal Pétain : il est âgé de quatre-vingt-quatre ans lorsqu’il obtient les pleins pouvoirs en 1940 et devient Chef de l’Etat. D’emblée, Pétain s’oriente vers une politique paternaliste qui rassure les notables français, lesquels, au cours des années trente, avaient vu leurs angoisses accrues par les soulèvements sociaux et l’avènement du Front populaire. Rassurés par la propagande de Vichy, ils sont nombreux en 1940 à voir l’ancien ennemi sous un nouveau jour : la lutte de l’Allemagne contre le bolchevisme et sa politique antisémite rendent parfois à leurs yeux plus acceptable la politique hitlérienne, et la collaboration proposée par Pétain est d’autant mieux acceptée que ce dernier a promis d’être l’homme qui « expierait les péchés du Front populaire ». Les sacrifices imposés par l’Allemagne apparaissent dans les discours de Pétain comme une juste punition à la débauche vécue sous la troisième République, qu’il importe d’éradiquer en ramenant les français à un comportement plus moral :
« Notre défaite est venue de nos