R Criture XXes Aujourd Hui Texte Th Tral Et Sa Rep Sentation Don Juan
Le mythe baroque de Don Juan n'a cessé de fasciner la littérature européenne depuis sa première apparition littéraire dans El Burlador de Sevilla y el Convidado de Piedra de Tirso de Molina en 1630. Rien ne semble pouvoir arrêter ce séducteur invincible, toujours en quête de plaisir ici-bas. Défiant la morale et la religion, ce rebelle lance un défi à la société tout entière. Son libertinage nécessite donc l'apparition d'une puissance qui lui est supérieure sur la scène. Tant que le public reste acquis à la foi chrétienne, la damnation de Don Juan par l'intermédiaire du Commandeur, véritable juge des enfers, reste crédible. Encore faut-il que le héros ne séduise pas trop le public par sa rhétorique et son noble orgueil! La représentation de la fin de Don Juan peut alors recevoir une interprétation ambiguë, comme cela est le cas dans le Dom Juan ou le Festin de Pierre (1665) de Molière. Un siècle plus tard, dans le contexte d'une sécularisation croissante de l'Europe des Lumières, l'opéra Don Giovanni (1787) de Mozart avec un livret de Lorenzo Da Ponte propose une version particulièrement spectaculaire de la mort tragique de Don Juan. Mais l'efficacité des moyens mis en œuvre pour impressionner le public ne relève-t-elle pas de l'esthétique plutôt que de la volonté de faire croire au public que la morale reste sauve? Enfin, dans la société individualiste et hédoniste de la fin du XXe siècle, la question de la fin de Don Juan nécessite un nouveau traitement. Le comportement donjuanesque est devenu monnaie courante et personne (ou presque) ne croit plus en enfer. Eric-Emmanuel Schmitt réécrit alors le mythe de Don Juan en fonction des interrogations contemporaines. Si le personnage du séducteur meurt dans la Nuit de Valognes (1991), c'est pour mieux renaître à une nouvelle identité : Don Juan est sauvé par l'amour qui devient sa nouvelle quête.