Évaluation 4ème
Au lieu de la triste masure dont on se rappelle la description lamentable, s'élevait, sous un gai rayon de soleil, un château tout neuf ressemblant à l'ancien comme un fils ressemble à son père.Cependant rien n'avait été changé dans sa forme. Il présentait toujours la même disposition architecturale ; seulement, en quelques mois, il avait rajeuni de plusieurs siècles. Les pierres tombées s'étaient remises en place. Les tourelles sveltes et blanches, coiffées d'un joli toit d'ardoises dessinant des symétries, se tenaient fièrement, comme des gardiennes féodales, aux quatre coins du castel, dressant dans l'azur leurs girouettes dorées. Un comble[1] orné d'une élégante crête en métal avait fait disparaître le vieux toit effondré de tuiles lépreuses et moussues. Aux fenêtres, désobstruées[2] de leurs fermetures en planches, brillaient des vitres neuves, encadrées de plomb, formant des ronds et des losanges ; aucune lézarde ne bâillait sur la façade complètement restaurée. Une superbe porte en chêne, soutenue de riches ferrures fermait le porche qu'autrefois laissaient ouvert deux vieux battants vermoulus à la peinture délavée. Sur le claveau[3] de l'arcade, au milieu de ses lambrequins[4] refouillés par un ciseau intelligent, rayonnaient les armoiries des Sigognac : trois cigognes sur champ d'azur, avec cette noble devise, naguère effacée, maintenant parfaitement lisible, en lettres d'or : Alta petunt[5].
Sigognac garda quelques minutes le silence, contemplant ce spectacle merveilleux, puis il se tourna vers Isabelle et lui dit : « C'est à vous, gracieuse fée, que je dois cette transformation de mon manoir. Il vous a suffit de le toucher de votre baguette pour lui rendre la splendeur, la beauté et la jeunesse. Je vous sais un gré infini[6] de cette surprise ; elle est charmante et délicieuse comme tout ce qui vient de vous. Sans que j'aie rien dit, vous avez deviné le vrai secret de mon âme.-