Justine permet un regard particulièrement intéressant sur la pensée de Sade grâce aux trois versions de ce récit, qui d’une part témoignent de son intérêt pour cette histoire en particulier, et de l’autre démontrent un changement majeur dans sa façon de penser, ou du moins sa façon de présenter sa pensée.
Il plane toujours au-dessus de toute discussion de la philosophie sadienne la question de son sérieux. Il y a bien des moments où il est impossible de le prendre au mot, tellement il pousse les situations et les pensées à l’extrême. Dans le cas des deux premières versions de Justine, de plus, Sade présente le roman comme l’histoire de la rédemption de Juliette : le récit des malheurs de Justine et sa mort ramèneront Juliette dans le droit chemin. Mais la philosophie la plus ardemment et constamment reprise au cours du roman nie entièrement et en bloc ce que propose le récit, et l’on s’en souvient bien plus. Il y a là un paradoxe.
La solution facile au problème est de prendre le récit de la rédemption de Juliette, qui forme un cadre au récit principal, comme une façon pour Sade de faire pa