A- La création littéraire comme un voyage vers l’inconnu
Une fois que l’on a clairement perçu la conception gidienne de l’humain et de l’existence, on est plus à même de comprendre le rapport qu’il entretient avec la création littéraire : « J’ai souvent pensé, […] qu’en art, et en littérature en particulier, ceux-là seuls comptent qui se lancent vers l’inconnu. » Le roman Les Faux-monnayeurs n’est que la manifestation physique de cette conviction. Protéiforme, empruntant volontiers à plusieurs genres, sans pour autant s’identifier à l’un d’eux en particulier, il est un défi littéraire que se lance l’auteur lui-même. Loin de rester comme beaucoup d’autres auteurs dans les eaux connues d’une littérature codifiée, Gide déconstruit les conventions, démonte les structures du roman classique.
Ce travail de destruction des canons de la construction romanesque est la conséquence de leur inaptitude à exprimer pleinement à la fois la réalité et le processus créatif d’après lui. Il qualifie d’ailleurs ces canons de « fausse monnaie » (d’où le titre de l’ouvrage