Il est devenu bien difficile aujourd'hui de désigner des rites indiscutables d'entrée dans l'âge adulte. Qu'en est-il, tout d'abord, des rites que les adultes, dans le passé, contrôlaient assez étroitement ? L'obtention d'un diplôme d'études secondaires, voire supérieures, ne constitue assurément plus un rite d'accès à l'âge adulte, particulièrement dans une conjoncture de crise économique. Il semble d'ailleurs que pour lutter contre "l'échec et les inégalités scolaires" on tende à faire de ces diplômes de simples certificats de présence sur les bancs de tel ou tel lieu de "formation", et que les jeunes eux-mêmes y prolongent leur passage pour éviter d'entrer dans la vie active et y prendre leur part de responsabilités. L'obtention d'un premier travail (et de son corollaire, le premier salaire) ne marque pas non plus, généralement, un véritable changement d'état, et ceci pour des raisons évidentes: instabilité professionnelle des jeunes, précarité des travaux qui leur sont confiés, etc. Les adultes eux-mêmes ont renoncé à exercer le rôle qu'ils jouaient traditionnellement dans l'initiation des jeunes : à preuve la tolérance grandissante des parents qui, au lieu d'aider réellement à l'envol de leurs enfants - quitte à les propulser hors du nid de façon pugnace - consentent à les y abriter de plus en plus longtemps ou à financer un logement pseudo-indépendant. Le plus grave est qu'ainsi se renforce un clivage social dans cette génération post-adolescente, le niveau socio-économique des familles permettant ou non cette prolongation excessive de la dépendance à l'égard des