Anna de Noailles
« Paroles à la Lune », in Le coeur innombrable

« Mes livres, je les fis pour vous, ô jeunes hommes... »

D’origine gréco-roumaine, Anna, princesse Brancovan, est née à Paris en 1876. Elle devient comtesse en épousant Matthieu de Noailles et dès lors évolue dans la haute société parisienne de l’époque. Après la publication de méditations sous forme de romans, d’une autobiographie relatant son adolescence et de trois recueils, elle obtint les plus hautes distinctions publiques, dont la Légion d’Honneur. Valsant entre romantisme et modernisme, sa poésie se caractérise par un écart entre forme et contenu, par des images dynamiques mais une structure classique. Dans ses poèmes s’entremêlent amours et déception, rêves et désir, l’auteur s’inspirant de sa vie personnelle qu’elle traite avec une vive sensibilité. Sa poésie passionnée et sensuelle traduit l’audace toute féminine qui dominait le romantisme féminin du XX siècle.

Dans ce poème construit sur des rimes embrassées la lune est prise à témoin de l’amour. Cependant cette fois-ci, Anna de Noailles présente un amour plus physique par la référence au « désir ». Les questions rhétoriques qui s’adressent à l’astre lui confèrent sa part de responsabilité dans l’amour ici un « péché » universel. En effet il concerne aussi bien la chèvre que Daphnis et Chloé, un couple de bergers qui s’éprirent l’un de l’autre et vécurent un amour chaste.
D’autre part, la poète assombrit son poème en y faisant référence au désespoir amoureux qui conduit à la maort de certains hommes, vers 15.

Ainsi, dans un poème audacieux sur l’amour physique, Anna de Noailles lie l’amour, la nature et la mort en prenant la lune à témoin, voire en la rendant responsable des passions