Annie Ernaux
Annie Ernaux est née en 1940 à Lillebonne, en Normandie, où elle a passé toute sa jeunesse. Ses parents, petits commerçants, tenaient un café-épicerie. Elle a fait des études supérieures à Rouen, Bordeaux, Grenoble. Elle a enseigné en Haute-Savoie, en région parisienne et au Centre National d'enseignement à distance. Elle a publié son premier roman en 1974, Les armoires vides, et obtenu le prix Renaudot pour La Place en 1984. Son livre, Les années en 2008 a été plébiscité par la critique et les lecteurs. Tous ses livres sont chez Gallimard à l'exception de L'autre fille (Nil, 2011) et de L'atelier noir (Les Busclats, 2011).
Pour son premier livre, en 1974, elle avait préféré ne pas s'exprimer directement en son nom. Dans Les armoires vides, Annie Ernaux s'appelait donc Denise Lesur. Cependant, l'écrivain ne cherchait pas à se cacher derrière un personnage de roman. Elle voulait déjà parler de l'itinéraire d'une femme, de la déchirure sociale, à travers une autobiographie qui dépassait l'anecdote personnelle et refusait la complaisance de la fiction. Le «je» est arrivé avec son quatrième ouvrage, La place, en 1983. Un livre court, tranchant, pour explorer un univers familier: l'histoire de son père, paysan, ouvrier, patron d'épicerie dans une petite ville de province. Soixante-deux ans de la vie d'un homme en cent quatorze pages, cliniques et intimes à la fois. La décision ferme d'un écrivain qui décline la tentation du romanesque et l'affirme dès les premières pages de son récit: «Depuis peu, je sais que le roman est impossible. Pour rendre compte d'une vie soumise à la nécessité, je n'ai pas le droit de prendre d'abord le parti de l'art, ni de chercher à faire quelque chose de "passionnant" ou d'"émouvant". Je rassemblerai les paroles, les gestes, les goûts de mon père, les gestes marquants de sa vie, tous les signes objectifs d'une existence que j'ai aussi partagée.»
Trahison sociale et sentimentale
Ce travail entomologique, cette écriture