Article autrui de dupoux
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Le solipsisme est une philosophie selon laquelle la seule réalité qui nous soit directement accessible est notre propre existence à titre de sujet pensant. C’est le cas de la philosophie de Descartes, telle qu’elle a été parfois interprétée à partir de la première Méditation (voir l’ouvrage Les méditations métaphysiques). En effet, le doute par lequel commence la réflexion consiste à supprimer notre croyance spontanée en l’existence du monde extérieur, dans la mesure où cette croyance se fonde exclusivement sur le témoignage de nos sens dont nous savons qu’ils peuvent être trompeurs. Mais, supprimer par le doute l’existence du monde extérieur, c’est découvrir notre propre existence en tant que sujet. L’acte par lequel nous mettons le monde à distance par le doute est en même temps l’acte qui nous permet de nous différencier des objets, du monde en général. Le sujet, en se mettant à distance du monde, découvre sa propre existence au sens où il s’aperçoit qu’il n’a pas disparu avec le monde et qu’il subsiste dans l’acte même par lequel il déploie cette distance. Douter, c’est dépasser l’étonnement qui nous révèle une existence n’ayant pas disparu avec le monde, notre propre existence à titre de sujet pensant. Le doute incite le sujet à se détourner du monde extérieur afin d’effectuer une réflexion sur lui-même. La seule existence qui résiste au doute est donc celle du sujet pensant qui, en supprimant sa croyance au monde extérieur, se découvre comme étant immédiatement présent à lui-même. C’est la célèbre affirmation : « Je suis ; j’existe. ». Or, on voit clairement que dans cette affirmation il n’y a tout d’abord aucune place pour l’existence d’autrui. En effet, l’acte de réflexion sur soi permet au sujet d’avoir la certitude immédiate d’exister pour lui-même, certitude qui n’est conditionnée ni par l’existence du monde, ni par celle d’autrui. Autrement