Blop le gendre
1942
Francis Ponge (1899-1988)
Présentation
L’homme
I. 1. Du jardin à la bibliothèque
Francis Ponge naît à Montpellier, le 27 mars 1899. Sa famille s’installe en Avignon. Le jardin qui entoure la demeure familiale devient pour lui le lieu de tous les bonheurs. Dans ce vert paradis des découvertes enfantines, il apprend à observer et aimer le monde qui l’entoure. L’apprentissage du latin, la lecture des auteurs antiques (Horace, Lucrèce) et classiques (Malherbe, La Fontaine), la découverte du Littré, le « merveilleux dictionnaire » que renferme la bibliothèque paternelle, renforce ses convictions : le monde des mots est aussi riche, aussi réel, aussi fécond, que le monde des choses.
2. De la douleur au monde muet
En mai 1923, Armand Ponge, le père du poète, meurt brutalement. Francis Ponge en est profondément bouleversé. De ces années de douleur, d’incertitude, naît une idée dont jamais il ne se départira : lorsqu’on est au bord du gouffre et qu’on a le vertige, lorsqu’on peut tout entier basculer dans le vide, il est vain de vouloir philosopher sur « la chute ou le désespoir ». C’est au plus près qu’instinctivement il faut regarder. Regarder attentivement le caillou qui est à ses pieds ; regarder la fleur, le brin d’herbe « pour ne pas voir le reste ». A la fin des années 20, Ponge se tourne délibérément vers le monde tangible, stable et rassurant des objets. Ce faisant, il tourne le dos aux gouffres intérieurs ; il échappe aux troubles de l’âme, surmonte son désenchantement.
3. Le poète à l’œuvre
A la fin des années 20, Ponge se rapproche du mouvement surréaliste qui occupe encore le devant de la scène littéraire et artistique, et se lie d’amitié avec Eluard. Mais son adhésion au groupe est fugace, superficielle. Alors que les surréalistes proclament la toute-puissance de l’irrationnel, du rêve, de la folie, Francis Ponge, en silence, avec la naïve