Dissertation voltaire candide
Le Binoclard hésita-t-il longtemps avant de choisir de nous prêter ce livre ? Le pur hasard conduisit-il sa main ? Ou bien le prit-il tout simplement parce que, dans sa valise aux précieux trésors, c’était le livre le plus mince, dans le pire état ? La mesquinerie guida-t-elle son choix ? Un choix dont la raison nous resta obscure, et qui bouleversa notre vie, ou du moins la période de notre rééducation, dans la montagne du Phénix du Ciel.
Ce petit livre s’appelait Ursule Mirouët. Luo le lut dans la nuit même où le Binoclard nous le passa, et le termina au petit matin. Il éteignit alors la lampe à pétrole, et me réveilla pour me tendre l’ouvrage. Je restai au lit jusqu’à la tombée de la nuit, sans manger, ni faire rien d’autre que de rester plongé dans cette histoire française d’amour et de miracles.
Imaginez un jeune puceau de dix-neuf ans, qui somnolait encore dans les limbes de l’adolescence, et n’avait jamais connu que les bla-bla révolutionnaires sur le patriotisme, le communisme, l’idéologie et la propagande. Brusquement, comme un intrus, ce petit livre me parlait de l’éveil du désir, des élans, des pulsions, de l’amour, de toutes ces choses sur lesquelles le monde était,