Etienne jodelle, "sonnet"
Etienne Jodelle
Amours - sonnets - Sonnet
Sonnet / Poémes d'Etienne Jodelle
Madame, c'est à vous à qui premièrement
J'ai voué mon esprit, et ma voix, et mon âme,
A qui j'offre ces vers que d'une sainte flamme
Amour même inspira à maint et maint amant.
Vous lirez sous le nom de quelque autre comment
L'amour de vos beaux yeux la poitrine m'enflamme ;
Vous verrez sous le nom d'une autre belle
Dame
De vos rares beautés le plus riche ornement.
Que si mon amour n'est par eux bien peint encore,
Que si votre beauté assez ne s'y décore,
Excusez, car
Amour n'a pu si ardemment
Qu'à moi ardre leur cœur d'un sujet si louable :
Il ne fut oncques
Dame, il ne fut onc
Amant,
A vous de la beauté, d'amour à moi semblable.
II
Des
Astres, des
Forêts et d'Achéron l'honneur,
Diane, au
Monde haut, moyen et bas préside,
Et ses chevaux, ses chiens, ses
Euménides guide,
Pour éclairer, chasser, donner mort et horreur.
Tel est le lustre grand, la chasse et la frayeur,
Qu'on sent sous ta beauté claire, prompte, homicide,
Que le haut
Jupiter,
Phébus et
Pluton cuide
Son foudre moins pouvoir, son arc et sa terreur.
Ta beauté par ses rais, par son rets, par la crainte,
Rend l'âme éprise, prise et au martyre étreinte ;
Luis-moi, prends-moi, tiens-moi, mais hélas ne me perds
Des flambants, forts et griefs, feux, filets et encombres,
Lune,
Diane,
Hécate, aux
Cieux,
Terre et
Enfers,
Ornant, quêtant, gênant, nos
Dieux, nous et nos ombres.
III
De quel soleil,
Diane, empruntes-tu tes traits,
La flamme, la clarté de ta face divine ?
Le haut
Amour, grand feu du monde où il domine,
Luit sur toi, puis sur nous luire ainsi tu te fais.
Pour toi les beaux pensers, les paroles, les faits,
Il crée en nous par toi, ni jamais trop voisine
Ne voile son beau feu, qui sans fin enlumine
Nos cœurs, faisant passer par tes yeux ses beaux rais.
Sans cesse il te fait