Fait urbain
Difficile de trouver un concept plus universellement partagé et usité que celui de « ville ». Un concept géographique? Peut-être, mais la géographie, en tant que discipline, a longtemps entretenu un rapport ambivalent au fait urbain : ainsi, la géographie « classique » du début du XXe siècle, dans une optique de « scientificité », a longtemps privilégié une approche régionale, construite principalement sur des fondements physiques et ruralistes. Cela a, de fait, eu pour conséquence de marginaliser les études de géographie urbaine de longues années durant. En fait, la ville restait plutôt le terrain d'étude réservé des historiens et des sociologues. Or, un coup d'œil rapide sur le partage inter-disciplinaire actuel du champ de recherche urbain montre clairement que la géographie y joue aujourd'hui un rôle non-négligeable. Comment l'expliquer? Tout d'abord, il y a la force de l'évidence qui est venue, principalement après la seconde guerre mondiale, profondément bouleverser la discipline : elle a pour noms « exode rural », « urbanisation », « industrialisation » et « planification ». En outre, il faut noter l'influence déterminante de la géographie américaine, qui, à partir des années 1950, et surtout dans les années 1960, révolutionne la discipline par sa critique du concept de « milieu », au profit de celui d' « espace ». Nous essaierons ici de répondre à une question en apparence provocatrice : la spécificité de l'approche géographique ne consisterait-elle pas en l'abandon du concept trop rigide de « ville » pour celui, plus adapté, d'« espace urbain »? En effet, le fait urbain n'existe pas en soi (première partie), mais dépend étroitement du contexte historique considéré, et donc aussi des définitions et des méthodes adoptées pour l'appréhender. En cela, l'évolution rapide, en France, des définitions utilisées en la matière par l'INSEE s'avère très révélatrice (deuxième partie). Pour finir, nous