Le libraire-éditeur de Neufchâlel, qui avait acheté l’ouvrage à Mercier, étant venu à Paris sans précaution et se trouvant muni d’un certain nombre d’exemplaires, fut arrêté, non pas tant pour le livre que parce que l’on comptait arriver par lui à l’auteur même. Mais celui-ci refusa obstinément de déclarer le nom de l’écrivain ; à toutes les questions, il se bornait à dire qu’il tenait le manuscrit d’un quidam qui était venu le lui apporter et qu’il ne connaissait pas. Apprenant et son arrestation et son généreux procédé, Mercier se précipita incontinent chez le lieutenant général Lenoir, un exemplaire du Tableau de Paris à la main : « Monsieur, lui dit-il, j’ai appris que vous cherchiez l’auteur de cet ouvrage : voici en même temps le livre et l’auteur. » Le lieutenant de police ne put se défendre d’un vif intérêt pour l’auteur et l’éditeur ; il entra en discussion avec Mercier et lui promit en le congédiant de présenter tout cela à Maurepas, sous le jour le plus favorable. L’imprimeur fut relâché, l’on se contenta d’arrêter le livre. Quant à Mercier, on le laissa paisiblement faire les apprêts de son départ pour la Suisse, où il allait achever son ouvrage.
Signalement[modifier | modifier le code]
Cet ouvrage enchaine les descriptions, les scènes, les tableaux tracés par Mercier avec vigueur, nerf, coloris et parfois un sarcasme sans lesquels rien ne l’aurait distingué d’un guide de la ville de Paris. Mercier regretta que l’idée qui lui était venue de traduire la physionomie physique et morale de Paris ne soit pas venue avant lui à quelque esprit observateur dont les investigations eussent été utile à son histoire : « Si, vers la fin de chaque siècle, un écrivain judicieux avait fait un tableau général de ce qui existait autour de lui ; qu’il eût dépeint, tels qu’il les a vus, les mœurs et les usages, cette suite formerait aujourd’hui une galerie curieuse d’objets comparatifs ; nous y trouverions mille particularités que nous ignorons : la morale et la