Hiroshima 54 jours d'enfer
Soudain, il y a n un éclair, puis un autre, et je me souviens - on se souvient toujours des choses idiotes - que je me demande sur le moment si ce sont des éclairs de lampes à magnésium ou des étincelles provoquées par un trolleybus.
Ombres et reflets, tout a disparu. Il n'y a plus qu'un nuage de poussière au milieu duquel je n'aperçois qu'une colonne de bois qui supportait un angle de ma maison. Elle a pris une inclinaison bizarre et le toit de la maison a lui-même l'air de hoqueter.
Instinctivement, je me mets à courir. Ou du moins j'essaie. Inutilement. Des poutres jonchent déjà le sol. J'ai grand-peine à atteindre le jardin. Et là, tout à coup, je me sens extraordinairement faible. je dois m'arrêter pour reprendre des forces. C'est là que je m'aperçois que je suis complètement nu ! Où sont donc passés mon pantalon et mon maillot ? Qu'est-il arrivé ? je regarde mon côté droit : il est tout ensanglanté ; j'ai également une blessure à la cuisse. L'éclat de bois qui l'a produite y est resté fiché. Quelque chose de chaud coule dans ma bouche : ma joue est déchirée. Enfin, en passant la main sur mon cou, j'en ramène un morceau de verre de belle taille que j'examine avec autant de détachement que si j'étais dans mon laboratoire, penché sur un microscope.
Et soudain, je pense : « Et ma femme . où est-elle passée ? » je crie : « Yaeko-San, Yaeko-San, où es-tu ? »
Mon sang continue à jaillir. Est-ce que par hasard j'aurais la carotide tranchée ? Est-ce que je vais saigner à mort, comme un porc qu'on égorge ? De plus en plus effrayé, et pour moi et pour elle, j'appelle de nouveau : « Yaeko-San, où es-tu ? Il est tombé une bombe de cinq tonnes. Réponds-moi, Yaeko-San. Où