La littérature africaine
• Il y a des idées toutes faites qui circulent et qui tiennent au fait que la littérature africaine francophone a été dominée par la figure d’un poète, Léopold Sédar Senghor. C’est un peu comme si on disait que la littérature grecque s’est arrêtée à Homère, toutes proportions gardées. Je dirais d’abord qu’il y a des littératures africaines. Il y en a dans les langues héritées de la colonisation : l’anglais, le portugais, le français. Et puis il y a des littératures dites traditionnelles. On appelle ça littérature orale, et là, bien sûr, il est plus difficile pour un Européen d’y avoir accès, mais parce qu’on traduit peu, on édite peu dans un domaine qui pourtant est extrêmement riche et qui date de centaines d’années, voire de millénaires. Pour la littérature écrite, il y a aussi les productions dans les langues nationales mais qui sont moins publiées pour des raisons économiques.
Dans ces littératures, il faudrait aussi parler d’époques. Ce qui s’est produit pendant ou à la fin de la colonisation est très différent de ce qui s’est produit après. Dans un premier temps, les œuvres étaient dans le droit fil de ce qu’attendaient les colonisateurs, mais très vite il y a eu des auteurs pour dénoncer les abus dont étaient victimes les colonisés. Par la suite, il y a la génération qui a mis en cause tous les régimes politiques mis en place après les indépendances et de très grands livres incarnent précisément ce rejet de la violence post-coloniale. Dans les deux cas, colonisation ou indépendance, c’est un roman de contestation. Comme disait Gide, on ne fait pas de la bonne littérature avec de bons sentiments. Ce n’est pas parce que ces livres traitent de la justice qu’ils sont bons pour autant mais c’est un fait que les auteurs ont beaucoup mis