Le bien ou le mal ?
« Elle » était encore assise sur son banc. Je pouvais facilement dire que c’était le sien : personne d’autre ne s’y asseyait jamais, et lorsque quelqu’un s’approchait, « elle » lui jetait un regard noir. Sa signification était claire : Ne pas s’approcher. C’était peut-être qu’« elle » n’aimait pas les gens, peut-être qu’« elle » avait besoin de solitude. Mais se retrouver seule sur un banc face à la mer, dans une station balnéaire, ce n’est pas chose simple. Alors, quand un inconnu avait l’audace de s’assoir à ses côtés (ce qui était vraiment très rare) elle montait ses jambes contre sa poitrine, et levait la tête vers la mer. Ca faisait souvent son petit effet, et il n’était pas rare qu’elle y finisse seule, sur son banc.
Et moi, je l’observais de loin. Cela faisait trois jours que nous étions, mes parents et moi, arrivés en Normandie. Deux jours de grisaille, un de beau temps. Ca me changeait de Strasbourg, ou le soleil régnait depuis mi-juillet. Nous étions en août, et ma mère avait décidé que nous partirions ici, au pays de la pomme, et des madeleines. Pas que j’étais contre, ça avait peut-être un certain charme le Calvados, mais je vous mentirai en vous disant que je le préférait à la côte d’Azur. Mes rêves de plage de sable fin, de trente-cinq degrés à l’ombre, et de garçons beaux et bronzés, s’étaient retrouvés anéantis avant même d’avoir eut la possibilité de commencer. J’avais quatorze ans, et à mon âge, on n’a pas trop de chose à penser que les mecs et les cours. Dans mon cas, la première partie était bien agitée, la seconde m’intéressait moins (au grand dam de mes parents).
Cette fille m’avait intrigué lorsque deux jours auparavant, à notre arrivée, j’avais tenté de m’assoir à ses côtés. Elle avait tourné la tête vers moi, jeté son regard noir, et ignoré royalement. J’en avais été vexé, bien comme il faut. Incroyable … Je n’arrivais pas à lui donner d’âge, je savais juste qu’elle était plus vieille que moi, surement majeure, mais ses petits yeux