Le vieux chat et la jeune souris
Comment composerais-je une fable nommée Le chat et la souris?
Dois-je représenter dans ces vers une belle
Qui, douce en apparence, et toutefois cruelle,
Va se jouant des coeurs que des charmes ont pris Comme le chat et la souris?
Prendrai-je pour sujet les jeux de la Fortune?
Rien ne lui convient mieux et c'est chose commune
Que de lui voir traiter ceux qu'on croit ses amis Comme le chat fait la souris.
Introduirai-je un roi qu'entre ses favoris
Elle respecte seul, roi qui fixe sa roue,
Qui n'est point empêché d'un monde d'ennemis,
Et qui des plus puissants, quand il lui plaît, se joue Comme le chat de la souris?
Mais insensiblement, dans le tour que j'ai pris,
Mon dessein se rencontre , et, si je ne m'abuse,
Je pourrais tout gâter par de plus longs récits
Le jeune prince alors se jouerait de ma muse Comme le chat de la souris.
LE VIEUX CHAT ET LA JEUNE SOURIS
Une jeune souris, de peu d'expérience,
Crut fléchir un vieux chat, implorant sa clémence,
Et payant de raisons le Raminagrobis « Laissez-moi vivre une souris De ma taille et de ma dépense Est-elle à charge en ce logis? Affamerais-je, à votre avis, L'hôte, l'hôtesse, et tout leur monde ? D'un grain de blé je me nourris Une noix me rend toute ronde.
A présent je suis maigre attendez quelque temps
Réservez ce repas à Messieurs vos enfants.»
Ainsi parlait au chat la souris attrapée. L'autre lui dit « Tu t'es trompée
Est-ce à moi que l'on tient de semblables discours ?
Tu gagnerais autant à parler à des sourds.
Chat, et vieux, pardonner ? cela n'arrive guères. Selon ces lois, descends là-bas Meurs, et va-t-en, tout de ce pas,