Le bateau ivre d'arthur rimbaud
(1871)
Poème de RIMBAUD Comme je descendais des Fleuves impassibles, Je ne me sentis plus guidé par les haleurs : Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles, Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs. 5 J'étais insoucieux de tous les équipages, Porteur de blés flamands ou de cotons anglais. Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages, Les Fleuves m'ont laissé …afficher plus de contenu…
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Mais pourquoi, l'imagination libérée par le simple contact avec ces morceaux de toile, Rimbaud voulait-il s'enfuir vers des rives lointaines à bord d'un voilier? Le début des ‘’Poètes de sept ans’’ ne laisse aucun doute : c'était parce qu'il ne pouvait déjà plus tolérer la discipline imposée par sa mère trop autoritaire : « Et la mère, fermant le livre du devoir, S'en allait satisfaite et très fière, sans voir, Dans les yeux bleus et sous le front plein d'éminences, L'âme de son enfant livrée aux répugnances. Tout le jour il suait d'obéissance ; …afficher plus de contenu…
Or, si Rimbaud pouvait déjà, à sept ans, traverser en imagination des « prairies amoureuses », des « houles lumineuses», des « forêts noyées », des « bois sidéraIs », de « lourds ciels ocreux », n'est-il pas tout naturel qu'à dix-sept ans il puisse s'imaginer faisant des voyages encore plus vastes tels qu'il les décrivit dans ‘’Le bateau ivre’’? D'autant plus qu'il avait alors goûté momentanément cette liberté ravie pendant ses trois fugues à Paris, à Bruxelles, et de nouveau à Paris vers la fin de 1870 et au début de 1871. D’autre part, il faut remarquer que ce poète, si précoce fut-il, si original se croyait-il, resta en partie tributaire de son âge. Par moments, ‘’Le bateau ivre’’ sent encore son collégien : il ressemble par le sujet à ces narrations qui, du temps d’Izambard, son professeur à